Si vous êtes confronté à un logement insalubre, vous savez sans doute à quel point cette situation peut être difficile à vivre. De façon parfaitement légitime, vous vous demandez s’il est par conséquent possible de demander un remboursement de loyer à votre propriétaire ? Dans cet article, nous allons vous expliquer comment cela fonctionne et quelles sont les démarches à entreprendre pour faire valoir vos droits.
Quand un logement est considéré comme insalubre ?
En France, un logement est considéré comme insalubre s’il présente un danger pour la santé ou la sécurité de ses occupants. Cette qualification repose sur la réglementation du Code de la Construction et de l'Habitation (CCH) et d’autres textes législatifs. L’insalubrité peut entraîner l’intervention des autorités et des mesures obligatoires pour le propriétaire.
Depuis le 1er octobre 2023, de nouvelles règles de salubrité sont entrées en vigueur, définies via le décret n° 2023-695 du 29 juillet 2023. Ce texte précise les critères sanitaires minimaux qu’un logement doit respecter pour être considéré comme salubre, renforçant ainsi les exigences en matière de sécurité, de ventilation, d’éclairage et d’équipements.
Un logement insalubre se manifeste par une forte humidité, une ventilation insuffisante, des moisissures (comme la mérule) ou la présence de nuisibles (cafards, punaises de lit, rats, etc.). Des signes comme des défauts structurels, des matériaux dangereux (plomb, amiante), un chauffage défectueux ou une surface habitable trop réduite doivent également alerter.
Attention : si les dégradations sont dues à un défaut d’entretien ou à des négligences du locataire, ce dernier ne peut pas engager de recours contre le bailleur. Les réparations locatives restent à sa charge.
Il est essentiel de faire la distinction entre les logements dits insalubres des logements dits indécents. En effet, à la différence d’un logement insalubre qui présente des risques importants pour la santé et la sécurité de ses occupants, un logement est considéré comme indécent lorsqu’il est inadapté en termes de confort (surface minimale non respectée, mauvaise performance énergétique, éclairage naturel insuffisant, difficulté d’accès à l’eau potable, infiltrations, réseau électrique non conforme, etc.).
À noter : tous les logements insalubres sont considérés comme indécents, mais l’inverse n’est pas toujours vrai.
Vivre dans un logement insalubre peut avoir de lourdes conséquences sur la santé physique et mentale des occupants. Parmi les troubles fréquemment constatés, on retrouve :
- Des problèmes respiratoires (asthme, bronchites, etc.) ;
- Des affections dermatologiques (irritations, eczéma…) ;
- Des allergies liées à l’humidité ou aux moisissures ;
- Des infections gastro-intestinales, fongiques ou bactériennes ;
- Des troubles psychologiques ou anxieux liés à un cadre de vie dégradé ;
- Des risques accrus d’incendie ou d’accidents domestiques.
L'insalubrité remédiable désigne un logement qui présente des conditions de vie ou d'habitat dégradées pouvant être corrigées par des travaux appropriés. À l’inverse, l’insalubrité irrémédiable correspond à un état tel que les travaux sont impossibles ou trop coûteux. Cela implique généralement la démolition ou reconstruction du bien pour assurer un environnement sain.
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Que faire en cas de logement insalubre ?
Lorsqu’un logement présente un risque pour la santé ou la sécurité, il est essentiel d’agir rapidement. Des démarches peuvent être entreprises à plusieurs niveaux pour faire constater la situation et engager les responsabilités du propriétaire. Selon la gravité constatée, des mesures peuvent être imposées, allant de simples travaux à une interdiction d’habiter les lieux.
Il est recommandé d'entrer en contact avec le propriétaire ou l'agence immobilière pour signaler tout problème ou besoin de réparations dans le logement loué. Dans un premier temps, vous pouvez tout à fait vous contenter de le contacter par téléphone ou de lui adresser une lettre simple pour lui signaler le problème rencontré. En effet, le propriétaire a l’obligation d’entretenir le logement et de réaliser les réparations nécessaires (à l’exception de celles qui incombent au locataire).
En retour, le propriétaire doit vous adresser un document écrit précisant les travaux à réaliser, la date de début d'exécution, le délai de réalisation, etc. Il est important de conserver toutes les preuves des démarches entreprises.
Si celui-ci ne réagit pas à votre demande, nous vous conseillons de lui envoyer un second courrier de réclamation en lettre recommandée avec accusé de réception. Voici un modèle de courrier que vous pouvez lui adresser.
Lettre de constat de logement insalubre
[Coordonnées du locataire]
[Coordonnées du propriétaire bailleur]
Objet : signalement d'un logement insalubre
[Madame ou Monsieur],
En tant que locataire de votre logement situé à l'adresse [situation du bien immobilier], je me permets de vous informer de l'état d'insalubrité de ce dernier.
En effet, je constate que ce logement présente des problèmes de [cause de l'insalubrité], ce qui nuit à ma [santé ou sécurité physique, en fonction de la cause d'insalubrité].
Par la présente, je vous demande de procéder rapidement aux travaux nécessaires pour résoudre ces problèmes.
Cependant, si ces travaux ne sont pas réalisés, conformément aux articles L. 1331-26 du Code de la Santé Publique, je me verrai dans l'obligation de faire appel au service d'hygiène pour constater l'insalubrité du bien immobilier.
Je vous remercie par avance de prendre en considération cette requête avec bienveillance, et je reste à votre disposition pour vous fournir toutes les informations nécessaires.
Veuillez agréer, [Madame ou Monsieur], l'expression de mes sincères salutations.
En parallèle de la notification au propriétaire, vous devez informer la mairie de votre commune. Cette dernière engagera une procédure de vérification avec les services communaux d’hygiène (SCHS) ou l’Agence régionale de la santé (ARS).
Pour déclarer un logement insalubre, il est nécessaire que l'ARS ou le SCHC rédigent un rapport exposant l'état d'insalubrité du logement en question, conformément à l’article L1331-26 du Code de la santé publique. Ce rapport est ensuite remis au préfet, qui prendra un arrêté de traitement d'insalubrité en fonction de la nature de l'état de l'habitation.
En cas d’urgence absolue (bâtiment menaçant ruine), un expert mandaté peut intervenir sous 24 h pour proposer des mesures immédiates : interdiction d’habiter, évacuation, démolition ou travaux obligatoires.
Si le logement ne remplit pas les conditions d’insalubrité, mais enfreint le Règlement Sanitaire Départemental, le maire peut obliger le bailleur à effectuer des travaux via une mise en demeure.
Quelles sont les conséquences d’un arrêté d’insalubrité ?
En cas d’insalubrité avérée, le préfet prononcera un arrêté d’insalubrité concernant le logement, qui sera communiqué au propriétaire bailleur, au syndic ainsi qu’à la mairie. La nature de cet arrêté — remédiable ou irrémédiable — dépend de la gravité constatée et entraîne des conséquences spécifiques pour le bailleur comme pour le locataire.
Un arrêté d’insalubrité remédiable signifie que le logement pourra de nouveau être occupé après la réalisation de travaux. Le délai de réalisation de ces travaux est notifié au propriétaire, qui s’expose à des sanctions en cas de retard ou de non-exécution : une astreinte allant jusqu’à 1000 euros par jour lui sera facturée.
Pendant la durée des travaux, si le logement est vacant, le propriétaire ne peut en aucun cas le remettre en location !
Un arrêté d’insalubrité irrémédiable signifie que même après des travaux, le logement ne pourra plus être habité. On parle alors d’interdiction définitive d’occupation du bien, et une suspension des loyers est appliquée sans limites de durée. Dans ce cas, le propriétaire doit impérativement proposer une solution de relogement à son locataire.
Si vous ne pouvez pas réaliser les travaux dans les délais impartis, il est toujours possible de vendre un logement insalubre.
Quels sont les droits du locataire en cas d’insalubrité ?
En France, le locataire bénéficie d'une protection légale contre les logements insalubres. Si le logement est jugé insalubre, le locataire peut bénéficier de mesures de protection telles que la suspension du paiement du loyer, la possibilité de quitter le logement sans préavis ou la mise en place d'un logement de substitution.
Selon la réglementation française, un locataire peut suspendre le paiement du loyer en cas d'insalubrité avérée du logement.
Si un arrêté de traitement de l'insalubrité est émis, le locataire n'a donc plus à payer le loyer à partir du premier jour du mois suivant l'envoi de la notification de l'arrêté (les charges restent dues). Il est indispensable d’attendre la notification de l’arrêté avant de cesser les paiements pour éviter de recevoir des poursuites pour impayés de loyer.
Signalons que dans le cas où le loyer a été payé malgré la notification de l'arrêté, le locataire peut demander le remboursement du loyer ultérieurement, dans un délai maximum de 3 ans.
Il est important de noter que l'aide au logement (APL/AL) est suspendue pendant la période où le loyer n'est pas dû et sera rétablie une fois que la levée de l'arrêté sera constatée, c'est-à-dire après la réalisation des travaux prescrits par l'arrêté et la reprise du paiement des loyers.
Le paiement du loyer doit reprendre au premier jour du mois qui suit l'envoi de la notification de la levée de l'arrêté.
Le propriétaire a l'obligation de proposer un hébergement gratuit au locataire en cas :
- D'interdiction temporaire d'habiter le logement ;
- D'évacuation momentanée ;
- De travaux nécessitant la libération temporaire des lieux.
Cet hébergement de substitution doit correspondre aux besoins et aux possibilités du locataire qui ne doit supporter que les charges liées à la consommation des fluides tels que l'eau, le gaz et l'électricité.
De son côté, le locataire est tenu de permettre l'exécution des travaux dans le logement et ne peut s'y opposer en aucun cas. Signalons également que le droit à un hébergement gratuit est perdu si le locataire refuse une proposition d'hébergement adaptée faite par le propriétaire.
En cas de refus, le propriétaire peut entamer une procédure d'expulsion devant le tribunal judiciaire.
Une fois les travaux réalisés et l'arrêté levé, le locataire doit réintégrer le logement initial. Le maintien dans le logement temporaire n'est pas possible. Le locataire reprend alors le paiement du loyer et des charges, en principe au plus tard au premier jour du mois suivant la levée de l'arrêté.
En conséquence, le bail du logement réintégré est prorogé de la période correspondant à l'exécution des travaux et jusqu'à la levée de l'arrêté.
Le propriétaire est tenu de faire une offre de relogement au locataire en cas d'interdiction définitive d'occupation du bien. Cette offre doit être adaptée à la situation personnelle et financière du locataire.
Le montant du loyer du nouveau logement est à la charge du locataire, mais le propriétaire doit lui verser une indemnité équivalente à trois mois du nouveau loyer pour couvrir les frais d'emménagement.
Si cette indemnité n'est pas versée, le locataire peut adresser une demande par lettre recommandée avec avis de réception, et en cas de refus, engager une démarche simplifiée devant le tribunal des contentieux de la protection (injonction de payer).
Comme pour l’hébergement temporaire, le droit au relogement est perdu si le locataire refuse une proposition qui correspond à ses besoins. Dans ce cas, le propriétaire peut entreprendre une procédure d'expulsion en saisissant la justice.
Si le propriétaire ne propose ni un hébergement temporaire ni un relogement, il ne peut pas demander l'expulsion du locataire qui reste dans le logement frappé d'une mesure administrative au-delà de la date d'interdiction d'habiter.
Quelles sont les obligations du propriétaire et les sanctions en cas d’insalubrité ?
En plus de l’hébergement ou du relogement du locataire, le propriétaire d’un logement insalubre est tenu de réaliser les travaux prescrits, de cesser toute perception de loyer et de ne pas relouer le bien tant que l’insalubrité persiste. En cas de manquement, le propriétaire s’expose à des poursuites pénales.
Les sanctions appliquées varient selon la nature du manquement :
- 50 000 € d’amende et un an d’emprisonnement en cas de refus d’exécuter les travaux ;
- 100 000 € d’amende et jusqu’à 3 ans de prison s’il refuse de reloger le locataire, continue de percevoir un loyer malgré l’arrêté ou tente de relouer le logement insalubre devenu vacant ;
- Les mêmes peines sont encourues s’il détériore volontairement le logement pour faire partir son locataire.
Ces mesures visent à responsabiliser les propriétaires et à protéger les locataires contre des conditions de vie dangereuses.