Les 12 motifs d’expulsion d’un locataire

Les différents motifs pouvant conduire à la résiliation du bail de location

Si un locataire manque à ses obligations locatives et outrepasse ses droits, le bailleur est en droit de mettre fin à leur relation en entamant une procédure d’expulsion. Cette procédure souvent longue et onéreuse doit être justifiée par des motifs légitimes. Très encadrée par la loi, l’expulsion d’un locataire nécessite dans la majorité des cas de recourir à la justice, seule habilitée à rendre une décision. Pour vous aider à y voir clair, nous avons recensé pour vous les 12 motifs pouvant conduire à l’expulsion d’un locataire.

Impossible d’expulser un locataire sans motif valable

Le lancement d’une procédure d’expulsion d’un locataire par le propriétaire doit être justifié par un motif recevable et sérieux. Seul le juge est habilité à prononcer la résiliation du bail. Cette procédure doit d’ailleurs être justifiée par un manquement avéré des obligations contractuelles du locataire.

Le bailleur n’est pas autorisé à procéder lui-même à l’expulsion de ses locataires. En cas de non-respect de cette obligation, il encourt une sanction pouvant aller jusqu’à 30 000 € d’amende et 3 ans de prison (article 226-4-2 du code pénal).

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L’importance de la clause résolutoire dans le bail de location

La clause résolutoire insérée dans le contrat de location a pour objectif de protéger le bailleur en cas de manquement de la part du locataire tel que :

Ces 4 motifs sont les seuls qui permettent de mettre fin légalement et unilatéralement à un contrat de location via la clause résolutoire (article 24 de la loi du 6 juillet 1989). Si vous souhaitez résilier le bail pour un autre motif, il vous faudra alors saisir la justice.

De la même façon, si la clause résolutoire ne figure pas dans le bail de location, il est nécessaire de passer par une résiliation judiciaire en respectant la procédure suivante :

  • mise en demeure ;
  • assignation en justice par un commissaire de justice ;
  • résiliation soumise à la libre appréciation du juge en fonction de la gravité des manquements du locataire.
  • expulsion du locataire uniquement en cas de décision favorable.

Les 12 motifs pour solliciter une expulsion du locataire

1. Le défaut de paiement du loyer

Selon l’article 7a) de la loi du 6 juillet 1989, le locataire a l’obligation de payer son loyer et ses charges aux dates convenues. Lorsqu’il ne le fait pas, le bailleur est en droit :

  • de résilier le bail automatiquement sans avoir à recourir au juge en présence d’une clause résolutoire ;
  • ou le cas échéant, de poursuivre le locataire en justice pour demander la résiliation du bail.

Dans un cas comme dans l’autre, la résiliation du bail par le propriétaire bailleur passe par des étapes bien définies. Le bailleur doit au préalable faire parvenir par voie de commissaire de justice un commandement de payer sous 2 mois au locataire. Si cette demande n’est pas suivie d’effet, le bailleur peut alors :

  • assigner en référé son locataire pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire et acter la résiliation du contrat de location de plein droit ;
  • demander le remboursement des impayés et/ou la résiliation judiciaire du bail d’habitation. La décision reviendra au juge qui statuera en fonction des éléments du dossier.

Signalons cependant qu’en application de la loi ALUR, le juge peut accorder un délai de paiement pouvant aller jusqu’à 36 mois en cas de difficulté financière du locataire.

L’arrêt du 10 octobre 2019 de la Cour de cassation précise que la gravité de la situation doit être globalement évaluée et pleinement justifiée pour entraîner la résiliation du bail.

2. Le défaut d’assurance du locataire

En vertu de l’article 7g) de la loi du 6 juillet 1989, les locataires d’un bien meublé ou non meublé ont l’obligation de s’assurer contre les risques locatifs. Ils doivent d’ailleurs fournir chaque année à leur propriétaire une attestation d’assurance habitation.

En l’absence de présentation de celle-ci suite à une mise en demeure restée sans réponse après un délai d’un mois, le bailleur peut :

Attention, la résiliation de plein droit du contrat de location ne peut intervenir que si le locataire ne détient pas d’assurance habitation. La non présentation de l’attestation d’assurance n’est donc pas un motif suffisant au regard de la loi.

3. Le refus du locataire de quitter les lieux après un congé donné par le bailleur

Si votre demande de congé est légitime et a été adressée dans les formes, le locataire n’est plus autorisé à rester dans les lieux après l’expiration du préavis de 6 mois. Après avoir fait constater son occupation illicite par commissaire de justice (huissier), il faudra alors saisir le tribunal d’instance afin d’obtenir son expulsion.

Un congé pour vente associée à une lettre de résiliation de bail pour vente envoyée par le propriétaire permet au bailleur de donner congé au locataire en respectant la loi.

4. Les troubles du voisinage (locataire ou chien bruyant)

L’article 7b) de la loi du 6 juillet 1989 stipule que le locataire a l’obligation “d'user paisiblement des locaux loués suivant la destination qui leur a été donnée par le contrat de location”. Il convient donc d’être particulièrement vigilant si vous résidez au sein d’une copropriété.

Les manquements à cette obligation incluent notamment :

  • les nuisances sonores (tapage diurne ou nocturne, aboiements, cris, etc.) ;
  • les nuisances olfactives (barbecue, ordures, etc.);
  • l’émission de poussières ou fumées ;
  • l’atteinte à l’esthétique de l’environnement (entreposage d’encombrants, enseigne lumineuse, etc.).

Pour qu’un trouble du voisinage conduise à une résiliation du bail, celui-ci doit être considéré comme continu, permanent et répétitif :

  • « crises à répétition, avec des insultes raciales, religieuses, homophobes, menaces, jets de bouteilles d’eau et bruits nocturnes » (Cf. Paris, 30 mai 2017, n° 15/16172) ;
  • « nuisances sonores (…), tambourinages, bruits de marteau, bruits d’objets lancés au sol, portes qui claquent, enfants qui courent sautent pendant de longues heures jusqu’à une heure avancée de la nuit » (Cf. Colmar, 26 juin 2017, n° 16/02017).

Attention, une gêne occasionnelle comme une fête n’est pas considérée comme un motif recevable (Cf. Cour d’appel de Metz, 3 février 2015, n° 13/02489.)

5. La dégradation du logement par le locataire

Conformément à l’article 7c) de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est responsable de l’entretien courant du logement ainsi que de toutes dégradations survenant pendant la durée du bail.

Un locataire peut donc être expulsé en raison de détériorations importantes ou d’une absence d’entretien du logement (Cf. Cour d’appel de Limoges, 30 janvier 2015 n°14/00207).

Une négligence du locataire à l’origine d’une dégradation du bien comme un dégât des eaux non pris en charge peut également être à l’origine d’une résiliation du bail (Cf. Cour d’appel de Paris, 11 juin 2015 n°13/16517).

6. La réalisation de travaux sans autorisation préalable

En application de l’article 7f) de la loi du 6 juillet 1989, le locataire n’est pas autorisé à transformer le logement ou ses équipements sans avoir obtenu l’accord préalable du propriétaire.

Par conséquent, le bailleur est en droit de demander au locataire de remettre le logement en état si celui-ci constate que des travaux ont été réalisés sans son autorisation.

Au-delà de la remise en état initial du bien, une résiliation judiciaire du bail peut être accordée pour non-respect des obligations locatives (Cf. Cour de cassation, 31 octobre 2006 n°05-10553).

Les travaux d’aménagement visant à améliorer l’esthétique ou le confort des lieux ne constituent pas une transformation du bien donné en location (article 6d) de la loi du 6 juillet 1989). Ainsi, le locataire n’a nullement besoin de demander une autorisation au propriétaire pour remplacer par exemple des revêtements muraux (Cf. Cour de cassation, 22 mars 2005, n°04-10.467).

7. La sous-location du logement sans autorisation

Un locataire n’est pas autorisé à sous-louer son logement sans avoir obtenu l’autorisation écrite de son bailleur (article 8 de la loi 89-462 du 6 juillet 1989).

En cas de manquement à cette obligation légale, le locataire prend le risque de voir son contrat de location résilié à ses torts exclusifs (Cf. Cour d’appel de Paris, 21 juin 2011 n°06/14542).

En outre, le bailleur peut également exiger du locataire le remboursement des loyers perçus dans le cadre de la sous-location illicite (Cf. Cour d’appel de Paris, 12 septembre 2019 n°18-20727).

8. Le non-respect du règlement de copropriété ou du règlement intérieur de l’immeuble

Outre ses obligations locatives, le locataire qui réside au sein d’une copropriété doit veiller à respecter le règlement intérieur ou le règlement de copropriété de l’immeuble.

Si le locataire occasionne des nuisances au sein de la copropriété, le copropriétaire bailleur est alors tenu responsable de ses agissements. Il lui incombe donc de réagir soit :

  • en donnant congé au locataire pour non-respect de “l’obligation d’user paisiblement des locaux loués” si le bail de location inclut la clause résolutoire prévue à cet effet ;
  • en intentant une action en justice afin d’obtenir une résiliation judiciaire du bail.

Dans les deux cas, le propriétaire devra apporter des preuves tangibles du non-respect du règlement de copropriété.

9. Le non-respect de la destination du logement

Un bien donné en location à usage d’habitation ne peut pas être utilisé comme local commercial ou professionnel. Par conséquent, un bailleur est tout à fait en droit de résilier le bail d’un locataire qui ne respecte pas la destination prévue sur le contrat de location (Cass. 3e civ., 2 juill. 2014, n° 13-18.731).

Un locataire peut néanmoins domicilier le siège de son entreprise à cette adresse pendant deux ans suite à sa création après avoir averti son bailleur (loi n°84-1149 du 21 décembre 1984 relative à la domiciliation des entreprises).

Concernant un local à usage mixte, le locataire est libre de l’utiliser aussi bien à des fins d’habitation que professionnelles sans restrictions durant toute la durée du bail. Toutefois, si celui-ci est utilisé uniquement dans un but professionnel, il ne pourra être renouvelé à l’échéance.

La résiliation du bail pour non-respect de la destination du logement ne pourra être effective qu’après constatation par un commissaire de justice d’un défaut de conformité (exemple : transformation du logement pour les besoins de l’activité).

10. De fausses informations communiquées lors de la signature du contrat de location

Il arrive parfois qu’un locataire communique de fausses informations à un bailleur pour obtenir un logement. Cela passe généralement par la falsification de documents dans le but de dissimuler son identité, sa situation personnelle ou professionnelle.

Dans cette configuration le bailleur peut exiger la nullité du contrat ainsi que l’expulsion du locataire en s’appuyant sur l’article 1137 du Code civil. C’est le cas notamment lorsqu’un locataire fournit par exemple un faux bulletin de salaire pour cacher au bailleur la réalité de sa situation financière (Cour d’appel de Paris, 15 septembre 2016 n°15/11660).

11. La cession du bail à un autre locataire sans autorisation

La cession d’un bail consiste à transmettre à une autre personne le bénéfice d’un contrat de location. Bien que légale, cette opération ne peut être réalisée qu’avec le consentement écrit du bailleur (article 8 de la loi du 6 juillet 1989).

Cela signifie qu’une cession de bail sans accord écrit du bailleur est considérée comme nulle et non avenue. De fait, un locataire qui cède son logement sans autorisation reste quoi qu’il arrive le seul et unique contractant. Cela implique que le nouveau locataire qui occupe le logement de façon illicite devra quitter immédiatement les lieux.

Le bailleur peut également assigner le locataire pour demander une résiliation du bail et/ou obtenir la réparation du préjudice commis.

12. L’utilisation du logement pour une activité illégale

Dans le cas où un propriétaire découvre que son locataire utilise le logement loué ou les parties communes pour exercer une activité illégale (trafic de stupéfiants, prostitution, etc.), il a tout intérêt à intenter une action en justice pour demander la résiliation du bail dans les meilleurs délais. Pour cela, il peut s’appuyer sur l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 qui précise que le non-respect de la jouissance paisible des lieux représente un manquement à ses obligations locatives.

La jurisprudence a d’ailleurs statué plusieurs fois en ce sens pour des faits de prostitution (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 19 nov. 2009, n°08/17336) ou trafics de stupéfiants (Cour d’appel de Paris, 31 janvier 2020, n° 17/16861 et Cour d’appel de Paris, 16 mars 2017, n° 15 18793).

D’ailleurs, un propriétaire qui aurait connaissance de l’usage illicite du logement et ne prendrait pas les mesures nécessaires pour mettre fin à cette activité risquerait de voir sa responsabilité engagée.

La résiliation du contrat de location pour activité illicite ne concerne pas seulement le titulaire du bail mais tout occupant du logement pouvant être mis en cause.

La procédure à respecter

La procédure d’expulsion n’est pas la même en fonction de la présence ou non de la clause résolutoire dans le bail de location.

La procédure d’expulsion en présence de la clause résolutoire

  • Mise en demeure du locataire avec réponse sous 1 mois ;
  • Commandement de payer sous 2 mois (en cas de défaut de paiement de loyer) par voie de commissaire de justice (huissier) ;
  • Saisine du tribunal judiciaire en vue de faire appliquer la clause résolutoire, de résilier le bail et d’expulser le locataire ;
  • Commandement de quitter les lieux après signification de l’ordonnance d’expulsion.

La procédure d’expulsion en l’absence de clause résolutoire

  • Mise en demeure ;
  • Assignation en justice du locataire par voie de commissaire de justice ;
  • Décision du tribunal au cas par cas.

Une fois l’expulsion prononcée par le tribunal

Après avoir obtenu une décision de justice prononçant l’expulsion du locataire, il s’agit ensuite de la faire exécuter selon le déroulé suivant :

  • demander à un commissaire de justice (huissier) de signifier cette décision au locataire qui dispose alors d’un délai d’un mois pour faire appel ;
  • si au bout d’un mois le locataire n’a pas fait appel et n’a pas quitté le logement, le commissaire de justice doit alors lui délivrer un commandement de quitter les lieux sous deux mois ;
  • enfin, si le locataire ne s’exécute toujours pas, le commissaire de justice peut demander à la préfecture le concours de la force publique afin de procéder à l’expulsion physique du locataire.

Voir aussi :

Trêve hivernale 2023 : dates et règles en vigueur
Assurance propriétaire non-occupant (PNO)
L'obligation de relogement du locataire en cas de vente
Les cas d'obligation de relogement du locataire
La mise en demeure de fournir l'attestation assurance locataire

Questions fréquentes

  • Quels sont les motifs d'expulsion d'un locataire

    Un locataire peut être expulsé pour diverses raisons, parmi lesquelles : le non-paiement du loyer, le non-respect des conditions du bail comme le défaut d'assurance habitation, la réalisation d'activités illégales sur la propriété, et le trouble de jouissance.

  • Quel est le délai accordé à un locataire pour quitter les lieux ?

    Suite à un commandement de quitter les lieux, le locataire à un délai légal de deux mois pour libérer le logement. Par ailleurs, il dispose d'un mois supplémentaire pour contester cette décision en faisant appel du jugement.

  • Quand ne peut-on pas expulser un locataire ?

    Pendant la "trêve hivernale", aucun locataire ne peut être expulsé de son logement. Cette période s'étend chaque année du 1er novembre au 31 mars inclus."

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